Accueil > Interventions > Ville de La Chaux-de-Fonds - Intervention de Pascale Gazareth sur le budget (...)

Séance du Conseil général du 14 décembre 2011

 Ville de La Chaux-de-Fonds - Intervention de Pascale Gazareth sur le budget 2012

jeudi 22 décembre 2011


Mesdames et Messieurs, Monsieur le président,

Le POP acceptera le budget 2012 en se réjouissant du résultat qu’il propose, encore un peu plus près des étoiles de l’équilibre que l’année passée. Le meilleur budget budget depuis 10 ans, lit-on dans le rapport de Conseil communal. C’est vrai, du moins au plan comptable. Mais qu’en est-il au plan politique ?

Au niveau des dépenses, les budgets Biens et marchandises ordinaires ont connu un nouveau tour de vis dans l’ensemble des dicastères. Ce n’est pas grâce à nous que les fournisseurs de matériel de bureau maintiendront leurs marges cette année.

Les dépenses de personnel augmentent, pour assurer la sécurité dans certains services, pour soulager un peu ceux qui étaient trop peu dotés depuis trop longtemps, ou pour mener à bien des projets dont on attend des retours sur investissement. Qu’on se rassure, rien de somptuaire, la Chaux-de-Fonds n’y perdra pas son rang au classement des dépenses par habitant. Nous sommes satisfaits de constater que l’appel à donner un peu d’air dans nos services communaux a été entendu. Satisfaits aussi qu’aucune nouvelle mesure d’économie sur le personnel n’aie été prise cette année, hormis un léger rabotage sur les échelons qualitatifs. Et à condition de ne pas tenir compte des efforts qui devront être consentis au niveau de la caisse de pension, dont le « tiers cotisant », le marché financier sur lequel les avoirs des caisses sont placés, a déclaré forfait. Un risque que personne n’a voulu croire et encore moins, anticiper mais que le POP avait dénoncé lors de la mise en place de la LPP.

Les factures issues des tâches collectives encore entremêlées et les reports de charges cantonaux ont continué leur inquiétante progression. Crèches, transports, et aide sociale coûteront cette année encore un peu plus que l’année précédente, voire beaucoup plus. Et cela sans que nous puissions y intervenir réellement. Nous sommes conscients de la nécessité de développer l’accueil extrafamilial des enfants et nos infrastructures de transports. Nous avons entendu les milieux économiques nous dire que ces éléments sont importants pour l’implantation de nouvelles entreprises et le maintient de celles en place. Nous nous questionnons néanmoins sur le mode de financement de ces infrastructures, quand les milieux qui les appellent de leurs vœux sont à la fois les premiers à en créer le besoin et peu empressés à mettre la main au porte-monnaie pour les financer. En créer le besoin en offrant peu de possibilité de temps partiel, surtout aux pères, en demandant des heures supplémentaires au lieu d’engager du personnel, en poussant à la propriété du logement qui limite notre mobilité résidentielle mais fait grimper nos transports pendulaires. Et les financer en acceptant une fiscalité moins compétitive mais capable de payer les infrastructures mises en place par les collectivités publiques, en proposant des cofinancements, en payant leurs impôts là où sont leurs activités réelles ou en finançant eux-mêmes une partie des crèches et des bus nécessaires pour que leur personnel soit à l’heure au travail.

Quant à l’aide sociale, sa progression depuis les années 1990 fait mal à nos budgets, certes, mais elle fait surtout mal à nos concitoyens et concitoyennes. Les personnes impliquées auprès des populations économiquement défavorisées font toutes le constat d’une dégradation marquée depuis la dernière crise de 2008. La pauvreté est aujourd’hui une réalité pour une partie de nos voisins et amis. Une vraie pauvreté, durable, qui accable l’esprit autant que le porte-monnaie. Celle qui vous fait sentir que vous ne servez à rien, que vous ne valez rien. Les distributions de nourriture gratuite ou à très bas prix n’ont pas fleuri pour rien ces derniers mois : ce sont des indicateurs fiables de cette paupérisation qui nous inquiète pour celles et ceux qui la subissent. Et qui nous scandalise en pensant à celles et ceux qui invoquent la concurrence pour refuser un salaire minimum pour leurs employés mais qui invoque cette même concurrence pour justifier pour eux-mêmes des bonus mirobolants et des salaires à 5 zéros, ou qui réclament le droit de défiscaliser les travaux de la quatrième cuisine qu’ils font poser depuis 2 ans dans la troisième de leurs résidences secondaires ou les bouteilles de champagne dont leurs rejetons ont rempli la piscine pour épater leurs amis lors d’une soirée qui passera fiscalement pour un « event » de l’entreprise familiale.

Et à celles et ceux qui trouvent que le social coûte trop cher, nous aimerions un jour présenter la facture de ce que coûte la richesse, si l’on met bout à bout les terrains qu’on équipe, les crèches, les bus, les autorisations de construire, les infrastructures hôtelières ou de congrès dont on soutient le développement, les salaires complétés par l’aide sociale, la formation de la main-d’œuvre, le maintien d’un parc de logement permettant d’éviter les conflits sociaux quand les salaires sont bas, les mesures de promotion économique et d’aide à la création d’entreprises, l’aide aux chômeurs en fin de droit qui évite de relever les cotisations des employeurs à l’assurance chômage, etc., etc., etc.

Au chapitre des recettes, nous ne manquerons pas de rappeler que la Chaux-de-Fonds touche une part de l’impôt des personnes morales largement trop basse par rapport au PIB produit sur son territoire, au nombre d’emplois qu’elle offre à toute la région et aux efforts de promotion économique qu’elle déploie au bénéfice de tout le canton. Rappelons que cela se répercute directement sur le niveau de notre fiscalité des personnes physiques. Nous attendons toujours que les autorités cantonales, compétentes en la matière, proposent une vraie solution, juste et équilibrée, à cette situation. Et une solution différente de simplement tout fusionner. Car si la fusion des communes facilite les discussions en réduisant le nombre d’interlocuteurs, elle est d’abord l’aveu de l’échec de notre démocratie directe et participative et marque l’abandon de l’Etat qui baisse les bras face au désinvestissement citoyen plutôt que de le combattre. De ce point de vue, nous nous inquiétons de la faible participation en ville lors des derniers scrutins populaires. Pour construire l’avenir de cette ville, nous avons besoin de travailler avec la population, et pas contre elle ou sans elle. Et pour cela, elle doit se sentir impliquée et écoutée.

Pour en revenir au budget 2012, nous aimerions saluer l’effort du Conseil communal pour développer des outils de maîtrise de nos investissements. Les critères développés permettent de faire des choix de manière plus judicieuse, en meilleure connaissance de cause. Pour nous, ces critères ne doivent pas servir de barrières rigides, mais de marqueurs pour savoir où l’on va. Les taux d’intérêts très bas nous permettent d’envisager une politique active qui marque notre volonté de développer cette ville et de préparer son avenir. Et cela malgré les nuages noirs de la tempête financière qui menace l’économie européenne et mondiale. Ce genre de tempête, la Chaux-de-Fonds en a déjà connu beaucoup, et elle a toujours pu les traverser, même si cela n’a pas toujours été sans dégâts. Ce qui nous inquiète plus aujourd’hui, ce serait plutôt l’épais brouillard qui commence à monter du Littoral. La récente déclaration de la ville de Neuchâtel à propos de l’hôpital a retenu toute notre attention. Il faudra guetter d’autres déclarations pour savoir s’il ne s’agit que d’une attaque isolée ou si elle représente, après le psychodrame de la fusion TN-TRN, un Pearl Harbour neuchâtelois, une déclaration de guerre contre l’esprit du Run, contre la stratégie « Un canton, une vision », contre les projets de collaboration entre les villes et l’autorité cantonale sur les grandes infrastructures scolaires, hospitalières, culturelles ou de transport. Face à la manne financière qui devrait lui tomber dans l’escarcelle avec la nouvelle fiscalité des entreprises, la capitale cantonale semble vouloir changer sa stratégie et se poser en centre cantonal unique. Notre ville, et plus largement les territoires hors Littoral urbanisé, sont directement menacés par la construction d’un Grand Neuchâtel. Car nul ne peut douter que pour se construire, celui-ci tournera le dos à un développement cantonal global au profit d’une concentration d’un maximum de ressources, d’infrastructures et d’investissements cantonaux. La saignée que nous vivons dans ce domaine depuis de trop nombreuses années dans les Montagnes sans réelle compensation ne pourra alors que s’accélérer. L’exemple du Locle nous montre qu’on peut voir sa situation financière s’améliorer sans pour autant se prendre pour les maîtres du monde.

C’est donc à la fois avec reconnaissance pour le travail de celles et ceux qui nous permettent de vivre ici aujourd’hui et de croire en notre avenir, et avec la conscience des difficultés qui nous attendent potentiellement, que nous accorderons au Conseil communal les moyens de poursuivre la politique générale qu’il nous propose pour notre ville via ce budget 2012.

Pour le POP, Pascale Gazareth

POP neuchâtelois  |   Dernière mise à jour: le 15 mars 2018

Site réalisé avec SPIP | Suivre la vie du site RSS 2.0